La croix et la bannière "J'ai rien fait, c'est pas moi !"

Que les médias accordent une attention considérable à l’incarcération de Nicolas Sarkozy, cela relève de l’évidence. Monsieur Sarkozy n’est pas un justiciable ordinaire. Cette couverture médiatique, loin d’être excessive, correspond à la stature de l’homme concerné.

Que l’affaire se soit transformée en spectacle quasi-théâtral demeure toutefois regrettable. Certains tentent de présenter cette condamnation comme injustifiée, une charge imméritée. Cette posture nous heurte profondément. Car cette charge, il l’a amplement méritée – non seulement à travers les 380 pages accablantes du jugement, mais également au regard de ses nombreuses autres mises en examen.

Lorsqu’on est lourdement condamné pour ses actes et son passé, on peut toujours clamer son innocence. « Ça ne mange pas de pain », comme on dit. C’est certes un peu dérisoire au vu des circonstances et de l’accumulation des charges. Mais là où la situation devient véritablement gênante, voire scandaleuse, c’est lorsqu’un ancien président de la République crie à l’injustice et proclame son innocence – ce qui revient, formulé plus clairement, à mettre en cause la culpabilité même de la justice de son propre pays.

Il aurait pu, à la rigueur, se plaindre de la sévérité du jugement sans remettre en question la justice elle-même. Il aurait alors paru seulement un peu moins ridicule, d’autant que c’est précisément grâce à ses propres déclarations et demandes répétées que la justice s’est montrée plus intransigeante. Mais d’impliquer la France – et donc tous les Français – dans sa misérable défense d’une prétendue innocence… Même Marine Le Pen n’aurait pas osé. D’ailleurs, elle ne l’a pas fait.

Est-il responsable du cirque médiatique auquel nous avons assisté ? Non, bien sûr. Aurait-il pu refuser ce spectacle et entrer en prison comme tout condamné qui le mérite ? Oui, assurément. Mais il a choisi de laisser faire, acceptant même que le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, garde-chiourme de circonstance, vienne vérifier personnellement son incarcération. Ce qui suppose, assez paradoxalement, que l’administration pénitentiaire ne ferait pas correctement son travail en temps normal, et qu’on ne la contrôlerait que lorsqu’il s’agit de Monsieur Sarkozy.

Détail amusant : on en fait beaucoup pour ce qui s’apparente à un stage de citoyenneté – quelques semaines d’incarcération tout au plus sous les projecteurs médiatiques, et non les cinq ans prononcés. Ce bref séjour carcéral fera certainement du bien à Monsieur Sarkozy, et un bien immense à notre démocratie. Au point que quasiment aucun homme politique ne s’est risqué à dénoncer une prétendue injustice. Au point même que Donald Trump, pourtant si prompt à commenter, n’a émis aucune déclaration, sentant le boulet passer dangereusement près de sa deuxième oreille.

Il n’y a certes pas à se réjouir qu’un homme soit emprisonné – personne ne le demande. Mais on pourrait au moins se satisfaire que la justice ait suivi son cours dans un État démocratique. En l’occurrence, je trouve regrettable qu’un ancien avocat général comme Philippe Bilger déplore que Monsieur Sarkozy ne purge pas l’intégralité de sa peine.

Qu’on le veuille ou non, les peines dans notre pays sont conçues pour être appliquées, non pour être contournées.

Bon alors Sarkozy en taule, c’est un peu – attendez, vous allez voir où je veux en venir – c’est carrément le trip pharaon, genre Toutânkhamon mais version XXIe siècle. On l’ensevelit avec TOUT son petit personnel. D’ailleurs, franchement, on a rarement vu un enterrement aussi five-stars.

Deux personnes. DEUX. Rien que pour lui. Qui vont probablement – je spécule, hein, mais quand même – lui ramener ses chouquettes du matin. Parce que bon, en prison, le petit-déj c’est sacré.

Ah, et deux gardes armés aussi ! Pourquoi ? Parce qu’il est à l’isolement, donc forcément ultra-menacé. Oui, je SAIS, la phrase se mord la queue comme un ouroboros qui aurait fumé la moquette, mais franchement, TOUT est absurde dans cette comédie-ballet qu’on ose appeler « l’incarcération de Nicolas Sarkozy ».

Jamais, au GRAND jamais, un type à l’isolement n’aura eu autant de monde autour de lui. C’est un peu comme être seul, mais version soirée networking. Son agenda ? Blindé. Complet. Surbooké.
Bref, la énième preuve – comme si on en avait besoin, mais bon – que selon ton standing social, t’es soit en prison-prison, soit au Club Med option « bracelet électronique Premium ».