L’observation des réactions sur les réseaux sociaux révèle un phénomène troublant : lorsque des voix africaines s’expriment dans l’espace numérique, elles semblent, dans une écrasante majorité des cas, apporter leur soutien à des figures autoritaires ou à des puissances interventionnistes voire dictatoriales. Ce constat, pour paradoxal qu’il puisse paraître au regard de l’histoire coloniale du continent, mérite une analyse plus nuancée que la simple indignation.
Cette apparente contradiction - soutenir aujourd’hui ce que l’on a combattu hier - révèle peut-être moins une incohérence qu’une forme de résignation politique profondément ancrée. Plutôt que de voir émerger une conscience anticoloniale unifiée, nous assistons à une forme d’acceptation, voire de célébration, de nouvelles formes de tutelle. Cette dynamique offre un éclairage saisissant sur la persistance des difficultés structurelles qui traversent de nombreux États africains.
L’instabilité politique chronique - cette « culture du coup d’État » qui semble rythmer la vie de certains pays - témoigne d’une difficulté récurrente à construire des institutions durables et légitimes. En l’absence de ces fondements démocratiques, le réflexe consiste invariablement à chercher un nouveau protecteur, qu’il soit local ou étranger, perpétuant ainsi un cycle de dépendance.
Cette méconnaissance de l’Histoire - et plus particulièrement de leur propre Histoire - constitue sans doute l’un des éléments explicatifs de cette situation. Comment construire un avenir émancipé quand les leçons du passé demeurent illisibles ou mal assimilées ?
Le mécanisme de déresponsabilisation qui accompagne souvent ces dynamiques - cette tendance à attribuer systématiquement les maux du continent à des forces extérieures - révèle une forme d’infantilisation politique qui les enferme dans un cercle vicieux.